23
jan

Les Clefs du « Seigneur des Anneaux »

   Ecrit par : Olivier Fèvre   in Art & Culture


LES CLEFS DU SEIGNEUR DES ANNEAUX


Tolkien : Écolo avant l’heure

Une bonne part du SDA est un hymne à la cohabitation harmonieuse entre les êtres vivants. Certes, l’univers de Tolkien est un monde fantastique — ou une « fantaisie » (de l’Anglais fantasy) pour reprendre le terme consacré. Et l’on ne s’étonne guère d’y trouver des aigles qui papotent ou des arbres qui vous tiennent (longuement) le crachoir. Mais c’est un peu court. En fait, Tolkien ne se lasse pas de décrire l’affinité que les différents Peuples Libres de la Terre du Milieu entretiennent avec la nature.

Principalement les Elfes qui vivent une quasi-symbiose avec les arbres ou les océans. Mais aussi les Nains qui savent extirper les richesses de la terre et des montagnes pour transformer cavernes et métaux précieux en œuvres d’art. Ou les Hobbits, espèce éminemment rustique, qui habitent sous des collines et hisse au rang suprême la culture du potager (rappelons que l’héroïque Sam Sagace n’est finalement… qu’un simple jardinier).

Quant aux Humains du Gondor, leur premier réflexe est de labourer les champs de Pelinor après la grande bataille qui les a ravagés. Mais plus profondément, le symbole même de leur nation est un arbre des temps anciens, incarnation de la paix et de la prospérité. Durant la Guerre de l’Anneau, il dépérit et est en passe de disparaître, d’où l’amertume du Roi Aragorn, même après la victoire. Heureusement, la découverte qu’un de ses fruits a donné naissance à un arbuste dans les montagnes matérialise le retour de l’espoir, le temps du renouveau : après la chute du Mal, et maintenant que la nature est réconciliée avec les hommes, c’est bien un nouvel Âge qui s’annonce.

Inversement, tout outrage à Dame Nature est décrit par Tolkien comme une des pires manifestations du Mal. Ainsi quand Saroumane se lance dans la production en batterie d’Uruk Haï, son premier ordre est de sacrifier l’antique forêt qui entoure son domaine pour s’en servir comme combustible. Cette même forêt qui abrite les Ents, ces arbres doués de raison qui personnifie si bien la nature ! Alors ils vont se rebeller, abandonner leur neutralité pour rejoindre le camp de la Lumière… et lui assurer des victoires décisives.

Les autres exemples ne manquent pas, comme ce désert implacable qu’est devenu le Mordor sous la coupe de Sauron. Ou le flétrissement de la grande Forêt Noir du nord, après son invasion par maintes créatures peu recommandables. Mais la meilleure illustration de cette emprise néfaste du Mal est sans nul doute le sort réservé à la Conté, l’« espace protégé » des Hobbits. Quand les quatre (petits) Compagnons de l’Anneau retournent au pays, ils le découvrent complètement ravagé : arbres déracinés, « trous-collines » abandonnés au profit de maisons en dur, champs et potagers laissés sans soins… et partout des « usines » où doivent trimer les Hobbits, quasiment réduits en esclavage. Terrible symétrie dans l’œuvre de Tolkien : les premiers chapitres du SDA évoquaient l’harmonie du Petit Peuple avec la nature, quand les derniers n’exhibent que pollution, conflits, mort et déchirements. En fait, c’est pour Tolkien l’image parfaite de ce qui attend les hommes s’ils ne prennent garde au monde qui leur est légué.

Pages : 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11

Tags: ,

Cet article a été publié le Vendredi 23 janvier 2009 à 0 h 31 min et est classé dans Art & Culture. Vous pouvez suivre les commentaires sur cet article en vous abonnant au flux RSS 2.0 des commentaires. Les commentaires et les pings sont actuellement fermés.

Les commentaires sont fermés pour le moment.